C’est pas parce que c’est médical que c’est permis

« Si quelqu’un met ses doigts dans ton sexe sans ton accord, ça s’appelle un viol. Même si c’est une sage-femme. Même si c’est dans une salle de naissance. »

La semaine dernière, j’ai accompagné une patiente dans un déclenchement. Ce n’était pas son souhait. Elle voulait accoucher à la maison de naissance.
Mais après 42 semaines, la pression était devenue trop forte : famille inquiète, équipe médicale insistante, protocole inflexible. Elle a dit oui, pour ne plus devoir lutter.

Un de ces oui qui ressemblent à un non.

J’étais là, à ses côtés, pour essayer de préserver un peu de son espace. De son rythme. De sa dignité. On a négocié chaque geste, chaque intervention. On a résisté à la mécanique, à la vitesse. À l’hôpital.

Et pourtant, le lendemain, j’ai été convoquée.

On m’a reproché de “ne pas me mettre du côté des soignants”.
On m’a reproché… de ne pas avoir imposé des soins que la patiente refusait.

Ce qu’on appelle soin, parfois, c’est juste de l’obéissance déguisée.

Rompre une poche des eaux sans accord. Injecter un produit sans prévenir. Faire un décollement des membranes sans l’annoncer. Dire à une femme exténuée “je vais vous aider”, et en profiter pour pratiquer une épisiotomie.

Et tout ça, toujours, au nom du risque. De la peur. De la routine.

Ce qu’on oublie ?
C’est que la peur est un outil de manipulation.
Et que sous pression, le consentement n’en est plus un.

J’ai vu des femmes dire “non”, et qu’on fasse quand même.

J’ai vu des femmes à qui on a dit :
“Si vous refusez, votre bébé peut mourir.”
Mais le bébé n’était pas en danger. Pas à cet instant.
On utilise l’épée de Damoclès pour faire plier les corps.

Et je me suis demandé : depuis quand une règle hospitalière a-t-elle plus de valeur que la volonté d’un être humain ?

J’ai assisté à des gestes posés sans accord, à des oui arrachés dans l’épuisement, à des silences confondus avec des permissions.

J’ai vu une femme à qui on a mis des forceps alors qu’elle criait “non”.
J’ai vu une main posée sur un ventre, des doigts dans un vagin, sans avertir, sans demander.
J’ai vu un mur se construire entre des parents et les soignants, dès l’instant où ils ont osé dire : “On veut comprendre avant d’accepter.”

J’ai vu, et je ne peux plus me taire.

Et si on appelait les choses par leur nom ?

Ce n’est pas une “erreur”, ce n’est pas un “malentendu”, ce n’est pas “juste pour aller plus vite”.

Quand une femme dit non, ou ne dit rien, ou n’a pas eu toutes les infos, et qu’on agit quand même sur ou dans son corps, c’est une violence.

Et parfois, oui, c’est un viol.

Ces mots sont durs. Mais ils sont justes. Et ils sont nécessaires pour que cesse l’impunité.

Le vrai consentement, c’est :

  • Avoir toutes les infos, pas seulement celles qui arrangent.

  • Avoir le droit de poser des questions, de douter, de refuser.

  • Pouvoir dire oui, mais aussi non.

  • Être entendu quand on dit non.

Et parfois, c’est juste avoir le temps d’intégrer, d’accepter. De dire “ok, maintenant je suis prête.”
Pas qu’on nous l’arrache entre deux contractions.

On m’a reproché de ne pas avoir convaincu.
Mais ce n’est pas mon rôle de convaincre.

C’est mon rôle de protéger. D’écouter. De traduire. D’interroger. De rappeler qu’un protocole n’est pas une loi. Qu’une femme enceinte reste une personne pleine et entière.

Et que dans une salle de naissance, l’humain doit toujours passer avant l’habitude.

Et que même en cas d'urgence prendre le temps d'expliquer changera tout le vécu.

Cet article est un cri, mais c’est aussi une invitation :
À ouvrir les yeux.
À interroger les réflexes.
À redonner du sens.
Et surtout, à redonner du pouvoir aux femmes.

Parce qu’on ne devrait jamais avoir à choisir entre accoucher… et être respectée.

Mely

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AUTEUR…

Mélyssa Chambard est sage-femme indépendante, podcasteuse et militante pour une naissance respectée et consciente. Elle accompagne les femmes avec douceur, puissance et conviction, loin des dogmes et du contrôle, en remettant l’humanité au cœur du soin.

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